INDEX
A propos de cette image :

Format
original : 305 x 190 cm -
Définition 300 dpi
Topologie de
l'imaginaire
Dans un premier commentaire sur ce paysage
panoramique à 360° avec deux horizons
j'insistais sur le fait que d'un point de vue topologique le panorama était
tout à fait cohérent.
Par la suite, en approfondissant mon raisonnement j'ai du
admettre que cette cohérence avait
en partie disparu, mais seulement pour la zone
informelle des nuages située au milieu de
l'image. Pour le reste comme on va le voir, avec
l'emplacement correct des deux horizons
et de leur perspective, l'image gardait sa
vraisemblance.
J'expliquerai par étapes, le protocole de
prise de vues pour l'assemblage, la méthode de
projection, et la réalisation finale du panorama. Les illustrations par
des schémas seront
pratiques pour une meilleure visualisation d'un espace théorique qui
dans la réalité échappe
au regard et que l'on peut seulement imaginer.
Protocole de prise
de vues
Le secret du zénith :

Selon le dessin,
situé au centre du paysage mon regard couvre horizontalement un champ
panoramique circulaire à 360°. Verticalement, depuis mon point de vue
jusqu'au zénith, le
champ est de 90°, un peu plus si je veux obtenir un début de
perspective en dessous de
l'horizon. En me retournant sous la voûte céleste, depuis le zénith jusqu'au point
d'horizon
opposé, j'obtiens 180°.

Je commence les prises
de vues par une première photo en un point précis au niveau de
l'horizon. Je continue verticalement jusqu'au zénith, je me retourne et je rejoins
le point d'horizon
opposé. Je reproduis ce même mouvement ainsi de suite et, en me décalant à
chaque fois
vers la droite, à la fin je suis revenu à mon point de départ. J'ai couvert
ainsi l'ensemble du
panorama. J'ai pris soin aussi de faire se juxtaposer toutes les photos
entre elles afin de
pouvoir produire des points de correspondance pour permettre
l'assemblage. Sur le schéma
seules sont indiquées les deux bandes de photos qui commencent et
s'achèvent aux quatre
points cardinaux.

Comme on le constate, en montant, les bandes
verticales vont progressivement se
superposer pour coïncider vers le point unique du zénith.
La
méthode de projection


Si je fournis à l'assembleur l'ensemble des photos
du panorama, celui-ci à partir d'une
ligne de coupe fictive, ouvrira la surface interne de la sphère
panoramique afin d'arriver dans un
mouvement d'extension vers une projection plane (ce mouvement est aussi fictif, il est indiqué
uniquement pour une meilleure compréhension). En théorie ce serait réalisable
mais les
algorithmes d'assemblage ont leurs limites. En pratique, pour toutes les
photos situées autour
du zénith, cette zone réduite étant agrandie et distendue sur toute
la largeur du panorama, les
déformations seront si importantes que
l'assembleur ne pourra les résoudre. De plus elles influeront
sur l'ensemble et tout le panorama sera modifié avec de nombreuses
aberrations .
Par expérience et pour un champ panoramique horizontal à
360°, je sais qu'il faut en limiter
considérablement le champ vertical. Comme montré sur le dessin, on
doit éliminer toutes les
photos placées au dessus du cylindre théorique, afin que l'assemblage s'effectue
correctement.

J'aurai donc au final une projection plane d'un
panoramique à 360° tronqué de toute sa partie supérieure.
Toutefois comme dans cette partie du ciel il n'y a que des nuages d'une
nature informelle, je peux augmenter
jusqu'à un certain point la hauteur du panorama en remettant dans
l'assembleur une ou deux bandes
horizontales de photos sans trop me
soucier des déformations induites.
Mais je n'ai là qu'un seul horizon et ce panorama ne
correspond pas du tout à ma première vision
de la chose.

Cette vision j'en ai eu l'intuition dès le début
des prises de vues en me disant que je pourrais
peut-être par la suite déployer une projection pour obtenir un deuxième
horizon à la verticale du
premier. J'envisageai plusieurs possibilités. Dans l'idéal il faudrait
que les bandes verticales des
photos demeurent parallèles, ceci pour éviter les déformations dans
la zone du zénith. Mais de
ce fait le champ horizontal du panorama resterait très limité. L'autre
solution, en faisant coïncider
les bandes au zénith, nous a déjà montré l'écueil des déformations. De toute façon
et dans tous
les cas, avec les outils d'assemblage dont nous disposons,
cette vision est irréalisable.
L'assembleur n'a pas été conçu pour effectuer un tel type de
projection. Pour réussir l'impossible
il va me falloir imaginer autre chose. Je pourrais aussi monter entièrement
l'image à la main sans
passer par l'assembleur, mais vu le nombre de photos engagées, plus
d'une centaine, ce serait
extrêmement long et fastidieux. En outre, même si l'assembleur est restreint
dans ses possibilités de
projection, il est d'une grande aide pour harmoniser les teintes et la luminosité des
photos entre elles.
La
réalisation finale
La solution était toute proche et finalement très
simple. A la suite des prises de vues pour le premier
panoramique, il me suffisait de recommencer et d'en réaliser un deuxième.
Une fois assemblé, de le retourner
et le basculer au dessus du premier. Toujours par souci de cohérence
je devrais seulement faire attention
de positionner parfaitement les deux images, de telle sorte que chaque
point de l'horizon dans le premier
panoramique corresponde à la verticale, à son opposé sur le deuxième
horizon. La limite entre les deux
panoramas sera annulée par des retouches qui harmoniseront aussi la
liaison des nuages. Bien entendu, au
milieu, une grande partie du ciel a disparu. Mais est-ce si important ?
Comme vous pouvez le constater
par vous même dans la réalité, depuis l'horizon où les nuages
lointains ont des formes précises et dynamiques,
plus on se rapproche de la verticale, moins ils ont de consistance et
ils se transforment dans la partie zénithale
du ciel en des masses informes.
Le
nombre d'or
La disparition de
l'inessentiel dans la partie zénithale du ciel est donc une solution élégante afin de
donner au
panorama final un rendu bien défini avec des contours affirmés pour les nuages,
tout en
essayant de garder encore une fois à l'ensemble sa cohérence.
En effet, il ne faut pas oublier que nous
avons affaire à la projection
d'une vision circulaire à 360° et un peu plus de 180° verticalement, impossible
à
appréhender par le regard, et que dans ce champ de vision imaginaire
son rapport homothétique doit
être conservé
en relation avec le rapport de largeur totale du panorama et sa hauteur
entre les deux
horizons, qui est donc de 1/2. Le dessin libre des nuages me donne
toute latitude pour positionner les deux
panorama en fonction de ce rapport et effectuer les retouches pour
harmoniser leur liaison. Par curiosité
j'ai regardé ce que donnerait l'image entière adaptée aux proportions
du nombre d'or. Il suffirait d'en diminuer
la hauteur en coupant dans les deux bandes de verdure en deçà des
horizons. Mais l'intéressante double
perspective qui emmène le regard vers le spectacle du ciel disparaîtrait
et cela ne me convient pas.
D'ailleurs je n'ai jamais apprécié cette valeur que l'on
trouve partout, du Parthénon au Modulor de
Le Corbusier, ou mathématiquement dans la suite de Fibonacci dont
les termes pourtant se dévoilent
souvent dans la nature. Mais les vertus soi-disant ésotériques du
nombre d'or ne me concernent pas. Je
pense que la valeur du monde est uniquement
proportionnelle à ce que nous en faisons.
La dynamique du
mouvement des nuages
Je n'en ai pas parlé jusqu'à
maintenant : Pour ma part le plus important est d'avoir tenté de donner
à ce
panorama une valeur esthétique. Non pas celle du cadre et des
proportions,
mais une valeur imaginaire
plus riche concernant précisément la
dynamique du mouvement des nuages.
Au moment de la prise de vue il y avait un vent venu
du nord. Regardant dans cette direction, au loin à
l'horizon le déplacement des nuages était imperceptible, mais
progressivement en levant les yeux je voyais
les nuages s'avancer vers et au dessus de moi. En regardant à l'est ils
allaient vers la droite. Au
sud ils s'éloignaient de moi et à l'ouest partaient vers la gauche. A
cause de tous ces mouvements répartis
sur l'ensemble du panorama, que j'ai mémorisés attentivement, je
savais que le logiciel d'assemblage
aurait des difficultés à trouver des points de correspondance entre
les photos pour un sujet en continuel
déplacement, que le rendu serait donc imprécis et au dessus de
l'horizon de plus en plus inconsistant.
D'avoir mémorisé les mouvements m'a permis par la suite de retoucher
ou redessiner les nuages pour
leur redonner des contours valables et surtout pour retrouver en la
soulignant autant que possible, la
dynamique de leurs mouvements.

Il y a quelques
années j'avais déjà pratiqué cette méthode sur ce panorama de ciel
à 360°, voire plus,
la licence de l'imaginaire autorisant toute liberté. A plus de 360° on
y découvre le même soleil répété de
part et d'autre de l'image. Dans le ciel, le contour des nuages était
magnifiquement ciselé par le vent.
Mais celui-ci excessif avait rendu impossible l'assemblage du panorama.
Les nuages allaient si vite
qu'ils se répétaient avec, même leur forme évoluant d'une photo sur
l'autre. Profitant de cette infortune
je les ai tous fait apparaître dans leur répétition pour traduire au
mieux dans la photographie leur
direction et leur mouvement. Cette expression en rappelle d'autres,
par exemple la peinture
futuriste
italienne du début du XXème siècle. Il y a aussi l'analogie
avec la photographie de Etienne-Jules
Marey, mais
son systématisme rigoureux ne me convient guère, eu égard à la richesse
opportune
qu'offre l'imaginaire.
Pour revenir à
la finalisation du panorama actuel, j'avais pensé aussi que je pouvais
simplement
copier le premier, l'inverser et le placer au dessus de lui-même. Mais
la symétrie serait trop visible
et le rendu statique en aurait détruit l'idée de mouvement. Ce jour-là
j'avais contemplé longuement
l'évolution du ciel. Les nombreux passages des oiseaux migrateurs, la
promenade d'un chien aux
quatre coins du paysage. Exécutant plusieurs séries de photos pour
l'assemblage et ayant
construit les panoramas, j'essayai diverses combinaisons. Il s'avéra
que les deux premiers
s'accordaient idéalement. Peut-être du fait que le temps de déplacement
des nuages entre les
deux images était suffisant pour éviter une symétrie prégnante mais
pas trop long aussi pour
faciliter la continuité d'un panorama vers l'autre.
Pour finir, la première version de ce commentaire
avait été peu probante, juste poétique, cachant
mon incapacité à raisonner mes intuitions. Je n'en garderai que la
conclusion, une dédicace
sans prétention au moteur de ma pensée, l'imaginaire
:
Le temps de réaliser les centaines de prises de
vues,
les nuages se sont déplacés.
Au milieu du ciel, plus de repère, le temps est suspendu, il s'écoule indéfiniment.
Si on cherche
une logique, on peut considérer cette image comme la projection plane d'un anneau
de Möbius.
Si on cherche le photographe, on pense qu'il aura été mangé par les fourmis, il ne
reste
de lui que son ombre.
albert
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