Illustrations créées dans le jeu Ubisoft, Avatar : Frontiers of Pandora™
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 Paysages

Bibi et Bambi
Sous le regard du monde

Des bambis d'un autre monde sous une lumière nacrée. Les enfants couraient devant deux immenses peintures de Jeff Koons sans les voir, un Mickey et un Bambi éclairés au néon dans la peinture. Ici dans l'image c'est le contre-jour et le plein jour réunis qui enfantent la lumière étrange. Et la réduction de la photographie, un tirage qui ferait quatre mètres de long avec tous les détails, vue sur l'écran d'un téléphone portable, inflige aussi par sa compression excessive une déformation importante. Il reste l'esprit nacré de la lumière. Comme la naissance de Vénus perlée dans sa coquille sous l'éclairage de Botticelli. Tout est faux tout est vrai dans les images. Surtout dans la photographie, même la toute première de Nicéphore Niépce inaugurant la suprématie de l'imaginaire sur le réel. J'en avais indiqué dernièrement la preuve formelle avec l'accumulation des mille soleils impressionnant toute la journée "Le point de vue du Gras". Cela déforma les ombres et illumina les façades des maisons à l'est comme à l'ouest. Une vision impossible et pourtant forcément vraie puisqu'il s'agit d'une photographie. La photographie est la preuve du réel. Non ! La photographie est la preuve de l'imaginaire. L'évidence de ma déclaration fit que personne n'en comprit l'importance inaugurale dans l'histoire de la photographie. C'est évident, tout le monde le sait, mais ce n'est pas grave. Personne ne s'en soucie. J'appelle cela la dilution de l'évidence. Nous vivons dans un monde irréel où la photographie habillée de l'imaginaire est devenue le principal médium de nos visions et nous a fait perdre nos repères sur la réalité nue. Les enfants couraient entre les bambis en bronze nacré de Jeff Koons sans les voir pour se précipiter fascinés vers les mobiles de Calder. Ils se souvenaient du petit film de l'artiste sur le cirque et ses clowns minuscules en fil de fer. Un mouvement identique des mobiles immobiles, rapide et lent, majestueux. Comme celui des éléphants gonflables. Des éléphants en fil de fer qui éclatent comme des bulles de savon. Tout devient réel dans l'imaginaire. J'appelle cela la concrétion de la création. Une pensée et un mouvement solides, aussi solides que les pierres. Mais les pierres sont fixes et ne possèdent aucune harmonie. Dans ma photographie tout est faux et tout est vrai. Regardez le positionnement apparemment absurde des ombres au premier plan. En fait la projection sur le plan de l'image circulaire dans la sphère a produit ce mouvement dynamique, on ne s’aperçoit de rien, et tout revient dans l'ordre, vraisemblable et harmonieux. J'appelle cela prendre des vessies pour des lanternes, des lanternes gonflables et des vessies en fil de fer. Certain des animaux étaient déjà là posés dans mon dos, j'ai positionné les autres avec leurs ombres, ou pas cachées dans les herbes, afin de poursuivre la dynamique du mouvement amplifiée sur l'ensemble de l'image, même dans le geste des nuages. Et aussi le fluide immobile de la croissance l'arbre. Regardez son tronc gigantesque au loin à l'horizon. Il étend sa ramure jusqu'au premier plan du spectateur. C'est normal, comme sous une coupole de verre il cherche la lumière en suivant la courbure intérieure de la sphère. Mon héros semble penché lui aussi, son regard tourné vers le sol. Pas du tout, il se tient bien droit et fier, la preuve son ombre à gauche. Seulement mon point de vue de photographe sur le paysage était fixé juste au dessus de sa tête .. Rien ne se perd rien ne se crée tout se transforme autour de nos pensées solitaires. Elles sont toutes sœurs d'une unique harmonie.

 

 

 

   Et la coupure, elle saigne ?

 


albert lemoine
Bonjour Nils,
Et la coupure, elle saigne ?
Les coupures que tu occasionnes parfois après coup dans mes textes en mettant l'accent sur tel ou tel aspect du récit me sont très utiles. Cela me montre qu'une partie d'une pensée peut sembler plus importante que la somme de toutes ses parties, pourtant cette somme devrait lui être supérieure. Ce qui en réalité n'est jamais le cas. C'est en effet une illusion de croire qu'on se situerait en dehors de notre pensée pour la dominer et juger de sa totalité comme si on possédait une méta-pensée. On retrouve la même problématique avec la conscience : La conscience ne peut être consciente d'elle-même. Nous sommes souvent piégés par ce besoin de prendre du recul pour mieux maîtriser la chose. Or la pensée n'est pas une chose. La pensée est un langage et dans le langage à la limite la chose est le récit. On peut effectivement l'objectiver, le manipuler, le couper, l'interpréter, après coup. Par exemple au second degré comme dans cette allégorie sur l'acte de couper dans le texte : Je nous vois bien apprentis à l'étal du boucher en train d'aiguiser nos couteaux devant une belle pièce de viande. Peut-être tu estimerais nécessaire d'ôter le gras alors que je préfèrerais le garder car c'est lui qui en cuisant donnera du goût à la viande. Ça se discute. Discuter le bout de gras. Ou bavarder avec un certain détachement. Ce qui n'est pas prendre du recul ni de la distance mais une agréable façon d'être avec les autres, ou avec soi-même quand on ne s'estime pas supérieur à ce que l'on écrit. La pensée tournera donc gentiment en rond sur sa circonférence, chacun ayant loisir de s'en tailler une bavette à chaque tour. Ensuite juste à point pas trop cuite encore tendre, après l'avoir laissée reposer nous aurons plaisir à la déguster.

Bon, tu penses bien, je suis entraîné aux pensées imagées. Je vois ce que j'écris comme je vois ce que je photographie. Non pas au sens propre de voir une réalité, il n'y a pas de prise directe sur le réel, mais au sens figuré de l'aveugle voyant, comme dans la parabole de l'aveugle et du paralytique. Je suis l'aveugle et la photographie-l'écriture le paralytique. Une association qui peut devenir très puissante du moment qu'on tolère l'incertitude de ce que l'on fait. L'écrivain photographe étant son propre guide tout en étant dépossédé de lui même par l'écriture et la photographie. Là je ne parle pas de l'écriture photographique, écrire avec la lumière ou écrire avec la photographie (avec la photographie par assemblage on travaille sur les deux niveaux), mais de l'autre écriture celle qui me sert à illustrer les photographies. Et que ici tu as donc coupée avec justesse ou pas je n'en sais rien, si tu ne le sais pas non plus, vive l'incertitude et l'expérimentation.

Mais au moins une chose est sûre, le texte sert la photographie et inversement. Les deux font bloc en illustrant le même récit. Ils sont composés de façon très similaire, du début à la conclusion et du premier plan à l'horizon. A la fin du texte je parle de l'harmonie un concept qui si j'ai bien travaillé doit se refléter partout dans l'image, même coupée. Une bonne photographie peut supporter tous les éclairages y compris la pénombre. Toutes les compressions comme de passer de 4 mètres au timbre poste d'un portable ce qui n'est pas une mince affaire. Et bien entendu toutes les coupures et recadrages. Alors pour ce qu'il en est du texte cela devrait être pareil. En tout cas c'est sympa de me l'avoir rappelé, je t'en remercie.